L'HEBDO — Lou Trotignon, comique ascendant mérou
L'HEBDO — Lou Trotignon, comique ascendant mérou

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Société
vendredi 24 novembre 2023
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Cette semaine, notre invité est Lou Trotignon, dont le spectacle "Mérou" se joue en ce moment à guichet fermé à la Nouvelle Seine.

"Mérou", étrange nom pour un spetacle de stand-up queer. Mais saviez-vous que le mérou pouvait à loisir changer de sexe pendant sa vie ? C'est l'une des choses que vous apprendrez si vous vous rendez au spectacle de Lou Trotignon, qu'il joue ces jours-ci à La Nouvelle Seine (Paris 5e). Cette semaine, ça fait même un an tout pile que son spectacle a commencé à tourné. En un an, il a changé, et Lou aussi. « Mon spectacle transitionne en même temps que moi », plaisante-t-il.

Lou Trotignon sera le 29 novembre au mk2 Quai de Seine pour une projection en avant-première de Orlando, ma biographie politique, le nouveau film de Paul B. Preciado.

Son spectacle se joue toujours chaque jeudi à 19h30 à La Nouvelle Seine. Les représentations sont toutes complètes, mais il sera de retour dès le mois de janvier, au même endroit. Et vous pourrez aussi le voir à Bayonne les 1er et 2 décembre, et à Avignon le 16 décembre.


Qu'est ce qui te touche le plus dans ton métier d'humoriste? 

Lou Trotignon : Ce qui me touche le plus, je pense, c'est quand je vois que mon parcours fait écho à d'autres personnes qui vivent les mêmes choses ou pas forcément. Une fois, un mec hétéro, la cinquantaine, est venu me voir après le spectacle et m’a dit : “moi aussi je doute sur plein de trucs, pas sur mon identité de genre, mais je doute”. 

Raconte-nous tes débuts dans le stand-up

J'ai commencé il y a deux, trois ans. À l’époque, je pensais que j'étais une meuf hétéro. Donc mes débuts, mes premiers sketchs, je racontais que tout le monde pensait que j'étais lesbienne alors que pas du tout. Donc j'ai dû tout réécrire en fait !

Au début, j'ai commencé dans une scène où il y avait que des meufs, parce qu'à l'époque, pour jouer en tant que meufs, il fallait aller à des plateaux pour les meufs. C'était comme ça que ça se passait. J'ai tout de suite été confronté au sexisme, on m'a fait des retours sur mes blagues en me disant “non, c'est pas comme ça qu'il faut dire” ou “c'est pas bien pour une meuf d'être comme ça”. Et du coup j'ai arrêté. Et plus tard, j’ai assisté à un atelier d’écriture avec Tahnee, une autre humoriste queer. On s'est rencontrés, elle m’a poussé à remonter sur scène, j'ai vu que les gens rigolaient, qu'il y avait un public, et du coup ça m'a touché. Et je me suis dit que j’allais continuer.

Est ce que tu as cherché à voir d'autres humoristes queer ? Et ça a été important pour les représentations que t'avais autour de toi ?

Moi, ça m'a pris du temps avant de me dire que j'étais queer. Je suis monté sur scène en pensant que j'étais hétéro, mais j'allais principalement à des spectacles queers. J'ai vu le Comedy Love, par exemple. C’est un spectacle créé par Tahnee, Mahaut et Lucie Carbone, avec aussi Noam Simseau maintenant. Et c'est que des queers et/ou féministes sur scène. Et ça m'a fait du bien d'être dans une salle de spectacle sans recevoir des blagues homophobes racistes. Je me suis juste senti bien et je me suis dit que j’avais envie de procurer moi aussi cette joie-là.

Dans son spectacle Nanette, l’humoriste Hannah Gadsby parle de sa volonté de quitter le monde du spectacle comique, car il est trop douloureux de passer par l'auto-dérision autour de son expérience en tant que personne queer. Qu'est ce qu’elle représente pour toi, Hannah Gadsby ?

C’est un modèle. Quand j’ai vu son spectacle, je n’avais pas enore commencé le stand-up. Et c'est en voyant son spectacle que je me suis dit : “ah oui, il y a la place pour les personnes queers”. Donc elle a une place énorme dans mes inspirations. C’est aussi un modèle en termes de technique d’humour : son dernier spectacle, Something special, et une masterclasse de storytelling.

Et en regardant ces sketchs, j'ai appris à écrire des blagues qui moi me faisaient plaisir, où je me moquais pas du fait que j'étais trans, mais je me moquais des trucs qui moi me font rire dans la transidentité, ou dans la transphobie parce que je trouve que la transphobie est très drôle des fois, dans le sens où elle est un peu absurde et tu peux vite la débunker. 

Alors comment est ce qu'on peut faire de l'humour sur les expériences queer sans que l'autodérision prenne un sens trop lourd? 

Déjà je pense qu'il faut être concerné pour en parler. Moi, ma méthode, c’est que je pars d'une émotion et après j'écris des blagues. Et mon émotion c'est jamais une haine de moi-même que je transformerais en blagues pour soulager la douleur. J’ai plutôt envie de créer un spectacle feel-good. 

Il y a 120 personnes dans cette salle où je joue et je veux que tout le monde se sente connecté.
Lou Trotignon

Après, ça n’empêche pas d’avoir recours à l’autodérision, et ça peut être très drôle. Au début de mon spectacle, je dis que j'utilise tous les pronoms, mais en même temps pas vraiment : j’utilise “il” mais j’aime pas qu’on dise que je suis un homme”, l’idéal ce serait “iel” mais j’arrive pas à m’y faire… Et après les gens sont confus.

Mais c'est pas vraiment de l'autodérision, cette blague, dans le sens où je suis pas en train de dire que c'est nul d'avoir plusieurs pronoms, je dis juste c'est marrant ce que ça crée comme confusion à l'intérieur de moi et pour les autres. Si tu pars de ton émotion et que c'est une émotion de détestation de toi-même, ça va se sentir sur scène. Mais l'autodérision peut être drôle aussi. 

C'est un spectacle sur et pour la communauté queer, et tu le dis au début : pendant une heure, tout le monde, toute la salle est queer. Qu'est ce que tu cherches à produire en mettant tout ton public dans cette case, y compris le public cishétéro ? 

Bah en fait, au début, quand j'ai commencé mon spectacle, je demandais toujours : qui est queer dans la salle et qui est hétéro dans la salle. Et je sentais que ça scindait la salle et j'avais pas envie de ça. J'aurais pu, ça aurait été tout à fait légitime que je veuille scinder la salle en deux et que les personnes hétéros se sentent un peu visées. Mais je veux créer une unité.

Moi, ce qui m'intéresse dans mon spectacle, c'est qu'il y ait une connexion. Il y a 120 personnes dans cette salle où je joue et je veux que tout le monde se sente connecté. Je me dis que si une personne hétéro vient voir le spectacle en se demandant un peu à quele sauce elle va être mangée, et que finalement elle se sent acceptée dans le truc, qu’elle joue le jeu pendant une heure, et qu’elle sort en se disant “on s’est sentis connectés”, alors peut-être que le gap entre nous et eux disparaîtra un peu, au moins pendant une heure. 

Tu racontes notamment dans ton spectacle un moment de solitude face à un public peu averti. Est ce que t'as déjà été surpris de l'accueil de ton spectacle de la part d'un public pas queer ?

Oui, tout à fait ! J'ai fait une tournée avec Le Printemps du rire. Donc le principe de ce festival, c'est qu'on va jouer dans des villages autour de Toulouse, où il y a peu d'accès à la culture. Et à un moment, j'arrive à Pointis-de-Rivières, dans une salle des fêtes, il y a des enfants, ça résonne… Et là, bêtement, je me suis dit que ces gens-là n’allaient jamais comprendre mon propos. 

Et en fait, je suis monté sur scène et j'ai souri. Je leur ai parlé et ils étaient à fond. Ça s'est hyper bien passé. Ils sont venus me voir à la fin en me disant que c’était la première fois qu'on leur parlait pas comme à des idiot·e·s sur ce genre de sujet. Et j'ai compris que j'avais des a prioris énormes sur des publics : en fait, c'est pas parce qu'ils sont hétéros qui vont pas capter ! 

Il faut savoir faire preuve de pédagogie sur ces sujets : moi, ma sœur est trans aussi, et quand elle m'a fait son coming-out j'ai fait plein d'erreurs au début parce que je ne faisais pas partie de la communauté queer, je n'avais pas les outils… Alors j'essaye de me remettre à cette place là pour un peu expliquer. C'est normal, il y a des choses que vous savez pas, on vous les apprend pas. Donc moi je suis là pour ça en gros. 

C'est pour ça que dans ton spectacle, il y a des moments un peu didactiques : tu demandes au public si tout le monde sait ce qu’est la testostérone, par exemple. Il y a une vraie volonté de transmission de l’information… 

En fait moi ce qui m'intéresse dans le médium de l'humour, c'est que c'est une manière de faire passer des informations et des connaissances avec du rire, en désamorçant les choses. Et le rire, ça met tout le monde d'accord. Quand une salle entière rigole, c'est trop plaisant, quoi ! Après, je pense qu'il y a d'autres manières de militer. Moi, je pourrais pas faire ça si à côté, il n'y avait pas toutes les personnes qui militaient de manière très sérieuse. S'il y avait que l'humour, ça marcherait pas. 

Tu partages beaucoup de ton intimité dans ton spectacle et c’est aussi ce qui le rend politique. Notamment un passage où tu mentionnes la période où tu as travaillé dans un club de strip tease. Est ce que ça a été difficile d'articuler un propos aussi politique tout en jouant sur la corde de l'humour? 

Ce texte-là, où je raconte que j’ai travaillé dans un club de strip-tease, c'était le texte le plus difficile à écrire de mon spectacle. Je trouvais trop difficile de le tester en Comedy Club. 

Le travail du sexe est un sujet très compliqué. J’ai travaillé ce moment avec mon metteur en scène, et on est d'abord passé par un gros travail pour comprendre pourquoi cette expérience était difficile, de quelle manière je veux mettre de l'humour et à quel endroit. Et du coup, ouais, c'était difficile. 

En plus, c'est un sujet très peu traité dans l'humour en France, même ailleurs. J'ai vraiment cherché partout. Souvent, c'est des gens qui racontent qu'ils ont eu une expérience et que c'était marrant. Mais personne n'a vraiment été travailleur ou travailleuse du sexe dans ce que j’ai vu. 

J’ai hyper envie de parler travail du sexe de manière positive parce que je pense qu'il y a des choses positives dans ce travail et que je veux que ce soit reconnu comme comme un travail, que ce soit dépénalisé… Mais moi mon expérience a été difficile, et du coup j'avais beaucoup de culpabilité en en parlant au début. Et finalement j'ai l'impression d'avoir un peu réussi à en parler de manière juste. Et mettre de l'humour là-dedans m'a aidé à me remettre de cette expérience. 

Dans ton spectacle, le coming out non-binaire vient avec son lot de doutes et d'incertitudes de la part des personnes qui nous entourent mais aussi de nous-mêmes. Est ce que faire des blagues dessus t'a aidé à y voir plus clair dans ta transition ?

Oui, moi je ne me suis pas dit que j'étais trans avant de le dire sur scène. Au début, je disais que je ne savais pas trop. Après j'ai dit “non-binaire”. Mais le mot “trans”, ça a été quelque chose parce que j'aime ça, être non-binaire. Je pouvais le vivre à l'intérieur de moi, ça pouvait être un secret. Mais quand je me suis rendu compte que je voulais, c’était que mon passing change, c’est-à-dire qu’on ne m’appelle plus “madame” (ce qui n’est pas du tout un passage obligé des parcours trans), je me suis dit que c’était quelque chose d’important de dire “trans” sur scène. Et du coup je l'ai dit, c'était il y a un an à Bruxelles et ça a été une libération ! 

Et après mon spectacle, je l'ai articulé autour de cette question de mon doute. J'avais très peur au début, j'avais honte de ce sentiment de doute. Je me dis peut-être je suis pas trans ou peut-être ça dépend des jours. Et j'ai vu que ça faisait écho à plein de gens. Et je me suis senti beaucoup moins seul. 

Tu as eu des retours de ton public par rapport à tout ça ?

Oui, et je reçois encore des messages ! J’ai fait une chronique sur France Inter il y a un mois maintenant, qui a bien marché sur les réseaux sociaux. Je reçois des messages de gens qui disent : ça fait du bien de voir quelqu'un comme moi… Du coup, ouais, j'en ai beaucoup. Et c'est trop bien, continuez ! 

Tu dis souvent que ton spectacle transitionne en même temps que toi, qu'est ce que ça veut dire? 

Ben par exemple, au début je disais pas que j'étais trans après je l’ai dit. Je disais que j’utilisais tous les pronoms, mais ça a un peu changé. J'ai fait ma mammectomie en juin, donc je l'ai insérée dans mon spectacle. Et puis là par exemple, je me pose plein de questions, qui ne feront pas partie de ce spectacle, mais peut-être d’un second. Par exemple : est-ce que j'ai vraiment envie d'avoir le passing d'un mec cis ? C'est des questions que je me pose. Qu'est ce que ça veut dire d'avoir l'air d'un homme dans la société maintenant ? Et du coup ça va évoluer aussi. 

Le fait d'avoir fait la mammectomie, ça a fini quelque chose dans l'histoire que je voulais raconter dans ce spectacle. Ce que je voulais raconter dans le premier spectacle, c'était à quel point je me sentais pas en accord avec ce qu'on demande à une femme d'être. Et je pense que j'ai fait le tour de ça. 

Donc un second spectacle est déjà en écriture ? 

Il est dans ma tête ! Je vais commencer à tester un peu des blagues. Je ne sais pas du tout où ça va aller, quel chemin il va prendre, mais il est là, quelque part. 

Qu'est ce que tu retires de ton expérience à France Inter en octobre, dans l’émission Le Grand dimanche soir

Déjà, on est hyper bien accueilli sur cette émission. En plus y a Mahaut Drama qui est une grande amie et qui est aussi une humoriste queer qui en fait partie. Je me sentais pas seul, et c'était ouf d'être deux personnes queers à France Inter !

En fait, j'étais fier. Il y avait un truc où je me suis dit : je crois que je suis une des premières personnes trans à faire une chronique sur France Inter. C'était la première fois que je faisais quelque chose sur une radio mainstream. J’avais une fierté de me dire : je ne suis pas invité parce que je suis queer, je suis invité parce que je suis drôle. 

Il y a une demande du public queer qui revient dans les salles, parce qu'avant on s'est éloigné des salles, parce qu'il y avait plein de propos homophobes, racistes, etc.
Lou Trotignon

Et je trouve que j'ai géré, j'ai kiffé, j'ai beaucoup travaillé et je m'attendais à ce que ça fasse un peu de bruit, mais je m'attendais pas à un tel buzz… et ça a remplit mes salles ! Donc c'est assez ouf. 

Je pense que j'avais peur que ma parole soit considérée “de niche”, même sur une radio aussi connue. Et en fait non, des gens pas du tout concernés se sont dit ah ben va entendre parler de transidentité par une personne concernée et on va aller voir le spectacle. Ça a vraiment fait ça quoi. 

Est ce que tu sens qu'il y a une scène queer montante dans l'humour aujourd'hui en France et dans le monde ? 

Alors dans le monde, je ne saurais pas exactement dire, parce qu’aux États-Unis, ça fait longtemps que ça monte. Rien que le fait que Hannah Gadsby soit une star, c'est c'est un marqueur important. Au Canada aussi, ça fait longtemps qu'il y a pas mal de personnes queers sur scène, alors qu’en France, c'est quand même très très récent. Je crois que l'une des pionnières pour moi, c'est Shirley Souagnon qui parle de non-binarité, d'être lesbienne, de plein de choses. Elle a vraiment ouvert les portes. Et maintenant, on est quatre ou cinq à commencer à monter un peu en force. Il y a Mahaut Drama, il y a Tahnee, Noam Simseau, Natacha Prudent… Et surtout il y a une demande. 

Il y a cette demande du public queer qui revient dans les salles, parce qu'avant on s'est éloigné des salles, parce qu'il y avait plein de propos homophobes, racistes, etc. Et il y a une demande d'un public pas concerné de comprendre ces questions-là parce qu'on en parle de plus en plus. Donc là, c'est en pleine montée, j'espère que ça va monter encore, on va voir. Mais si on prend l’exemple du festival de Montreux, qui est la référence dans le stand-up : nous, on monte, on remplit nos salles et on n'est toujours pas invité·e·s. On nous dit que c'est trop tôt pour le public de Montreux. Alors que d’autres sont invité·e·s, iels ont commencé il y a longtemps et ne remplissent pas leurs salles.

Donc là, on est en train de travailler ça. Et je pense que ce serait une grande réussite si on pouvait pousser les portes de ce festival. 

Est ce qu'il y a une volonté de créer un Comedy club queer, quelque chose comme ça ?

Bien sûr, on essaye de le faire. Déjà à Paris, il y a Tahnee qui fait un Comedy club à la Flèche d'Or. Moi je vais à la Mut’up à la Mutinerie, une fois tous les deux mois. Mais un vrai lieu Comedy Club queer, c'est un projet qui me fait rêver, mais c'est très compliqué. Il faut des connaissances administratives, il faut du temps. Et en fait, nous, on est déjà en train de faire notre petite place, d'aller dans des Comedy clubs, de se faire connaître et du coup on n'a pas le temps de le faire. Mais ce serait trop bien qu'il y ait un lieu. Je ne sais pas si ça pourrait être que queer parce que du coup y aurait six humoristes et on tournerait en rond (rires). Mais en tout cas, un lieu féministe qui ferait attention à toutes ces questions-là, ce serait bien. 

Celleux qui ont déjà pris leurs places. Vont pouvoir te retrouver le mercredi 29 novembre au MK2 Quai de Seine pour l'avant-première de Orlando, ma biographie politique, le dernier film de Paul B. Preciado. La projection sera suivie d'une discussion entre Virginie Despentes et Paul B. Preciado, que tu vas animer. L’événement est déjà complet, mais est ce que tu peux nous en dire plus sur ce que ça représente pour toi ? 

Je suis effrayé et très fier. En fait, c'est une personne qui est venue voir mon spectacle et qui s'occupe un peu de tout ça et qui m'a dit qu'il y a des choses qui faisaient énormément écho dans mon spectacle au film de Preciado. Du coup, moi je l'ai vu en avant-première et c'est vrai que c'est ouf. Et c'est ça qui est beau dans ce film, sans en dire plus, c'est que même si nos expériences trans sont extrêmement différentes et individuelles, il y a aussi des choses en commun. 

Et du coup je suis extrêmement touché, extrêmement fier. J’ai très peur de rencontrer ces modèles pour moi. Paul B. Preciado, je l’ai lu, notamment Testo Junkie au début de ma transition. Virginie Despentes aussi évidemment. Et donc moi, je vais faire un sketch de dix minutes avant le film. Et après la projection, il y aura la discussion et ce sera diffusé dans plein de cinémas en France en même temps. Et moi, ce qui me fait le plus peur, c'est de trouver des questions intelligentes à poser à ces personnes qui sont extrêmement intelligentes. J'ai peur d'avoir l'air bête parce que c'est un film très beau et moi je fais des blagues sur mes poils interfessiers ! (Rires.) Mais j'ai très hâte !

Pour finir, c'est quoi les prochaines étapes pour ton spectacle et ta carrière ?

Eh bien comme tout va vite, c'est des grandes questions que je me pose en ce moment. 

J'ai hyper envie de capter ce spectacle assez vite, de faire une belle captation, donc de le filmer dans un lieu culturel queer qui nous est cher. Je ne sais pas encore lequel, mais un beau lieu, un lieu qui fasse sens, et que ce soit en archive quelque part. Qu’il y ait une archive d'un spectacle d'une personne trans en France, quelque part, je trouve que ce serait beau, même si ce n’est que mon histoire.

J'aimerais beaucoup écrire des séries, j'aimerais beaucoup jouer dans des séries... Et puis il y a l’écriture du prochain spectacle. 

Je pense que j'ai une petite envie de faire un spectacle éphémère, uniquement pour les queers. Pour le coup, pour toutes ces choses que je ne dis pas qu'on ne peut pas dire dans un spectacle qui est accès aussi aux personnes pas concernées… Il y a des choses qu'on ne dit pas sur notre communauté, on ne peut pas les dire parce qu'on a peur que ce soit réutilisé par nos adversaires. Par exemple, la question de comment on se traite dans notre communauté. La question des “call-out”, la question du doute aussi. Des fois, il y a des personnes qui ont l'impression de choisir leur transition et c'est ok aussi. Est ce qu'on peut en parler ? Comment on peut en parler ? Des questions qui font un peu trembler, en tout cas qui me font trembler, moi.


Références citées dans l'émission

Nanette, l'incontournable spectacle de l'australienne Hannah Gadsby, est toujours à voir sur Netflix !

• La chronique de Lou Trotignon sur France Inter, en octobre dernier


L'équipe de l'émission

Présentation : Diego de Cao

Réalisation : Colin Gruel

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