Exile One • Réflexion
Il est né la même année que Billie Holiday. Il y a 100 ans. Alors que l’interprète de Strange Fruit a incarné depuis ses tout débuts la figure absolue de la chanteuse de jazz, il a fallu un peu d’encre, de salive et de sueur pour que Frank Sinatra ne devienne à part entière son pendant masculin.
Si Lester Young ou Miles Davis reconnaissent en lui une réelle influence, si la première idole des baby soxers et teenagers a remporté pendant des années les référendums les plus corporatistes pour le premier rang des chanteurs, on peut dire sans trop se tromper que l’existence de Frank Sinatra a souvent réduit son art aux clichés. Au mieux, on convient souvent que l’homme vil - notamment avec les femmes –, veule - ses fréquentations mafieuses -, violent – avec ses ennemis – ne l’empêchait pas d’être un maître-chanteur, laissant le charme à d'autres. Mais sa mâle assurance était peut-être trop parfaitement rodée pour coller à l’esprit débridé et parfois génialement hasardeux des grands du jazz.
Ce centenaire aura en définitive levé les derniers doutes : Sinatra ne fut pas qu’un crooner pour dames d’abord puis pour le public adulte des années Capitol et Reprise qu’il abreuva de standards. Il fut aussi et surtout pour la postérité un véritable chanteur de jazz, jaloux d’une technique monstrueuse, d’un goût toujours très affirmé (compositeurs, arrangeurs, accompagnateurs), sûr de ses effets à la réserve de puissance affolante. Avec lui chaque chanson devient vraie, universelle, définitive. L’apanage des grands : Louis Armstrong, Nat King Cole, Ella Fitzgerald et Billie Holiday, donc.
Jazz and Co vous propose de découvrir les aspects moins connus de cette suprématie vocale incontestable.
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