Bolivard • Tout le monde
Je suis Jade, et aujourd’hui je vais vous parler de rugby, de mouvement et de géométrie.
Dans la première moitié du XXe siècle, l’artiste André Lhote peint une huile sur toile intitulée Partie de rugby. Sur un fond de grands nuages simplifiés et accidentés, six rugbymen en formes géométriques créent une pyramide de leurs corps enchevêtrés. Au sommet de ce triangle se trouve l’objet de leur convoitise : le ballon ovale. En marge, à droite, un septième joueur nous tourne le dos, prêt à poursuivre l’action. Il est, à notre image, spectateur de cette lutte aérienne. Les maillots, tantôt quadrillés d’un camaïeu de vert, tantôt rayés de rouge et de blanc, nous indiquent les deux équipes qui jouent à ce que l’on appelait encore à l’époque le football-rugby.
Pourquoi un tel sujet ? Si la tradition veut que l’anglais William Webb Ellis ait créé le rugby en 1823, ce sport n’atteint la France que dans les années 1870. D’abord dominé par l’élite parisienne, le rugby gagne Bordeaux qui devient, en 1899, le premier club de province sacré champion de France. André Lhote, originaire du sud-ouest, se fait donc le témoin de la popularité du rugby mais avec une approche cubiste.
Vous êtes devant l’œuvre et vous vous étonnez sûrement : il n'y a ni perspective, ni modelé, ni contours définis. L’artiste s’intéresse plutôt aux aplats de couleurs et à la simplification des corps. C’est le vocabulaire cubiste. Par-là, le peintre insiste davantage sur le mouvement. Mais comment ? L’équilibre de la pyramide est menacé par la contradiction des gestes de chaque joueur. Le ballon, à moitié sorti du cadre, est attrapé in extremis. Quant à la couleur, elle est là pour créer du rythme : l’alternance des complémentaires rouges et vertes des maillots crée à la fois une luminosité et une cadence dans l’action. L’efficacité de l’œuvre est donc paradoxale : c’est dans la confusion des formes et des couleurs qu’André Lhote nous éclaire sur notre perception du jeu sportif.
Présenter cette œuvre est l’occasion pour moi de vous montrer, j’espère, combien les formes plastiques sont capables de représenter l’instantanéité. C’est pour moi, un des enjeux majeurs de l’art.
Partie de rugby, André Lhote, huile sur toile, 1m x 0.8m, début du XXe siècle, Saint Quentin, Musée Antoine Lécuyer.
Texte et voix : Jade Laouna
Enregistrement : Kélian Jeannez
Montage : Jean Foucaud-Jarno
Musique & web : Philipp Fischer
Coordination : Julia Martin & Grégoire Verprat
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