L'émission qui mêle la recherche aux actes pour une société plus écologique • À La Racine Des Mots
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Décoloniser l'Afrique : c'est le titre du livre de Bernard Lugan, paru en 2011, qui s'inquiète de la recolonisation actuelle de l'Afrique par les puissances des autres continents via leurs multinationales, l'ingérence politique et autres procédés incidieux. Il suggère qu'« un demi-siècle après les fausses indépendances, la véritable libération de l'Afrique est à la fois nécessaire et urgente. » En 2015, Arthur Manuel, autochtone de Colombie Britannique propose lui de décoloniser le Canada dans son livre "Unsettling Canada, a national wake up call". Il y dresse, avec le grand chef Ronald Derickson, un chemin pour une économie indigène durable au Canada. Mais ces mots signifient-ils la même chose ? La décolonisation que propose Bernard Lugan pour l'Afrique et la décolonisation que propose Arthur Manuel pour le Canada sont-elles les mêmes ? La main mise de l'Europe, maintenant l'Amérique et l'Asie sur le continent africain est une réalité indéniable : en témoigne le seul fait que 15 pays d'Afrique partagent comme monnaie le franc CFA, dont le court est défini par la France en fonction de l'euro, ce qui les prive de facto de politiques monétaires nationales ou au moins africaines. Mais si cette main mise n'a jamais cessé depuis la colonisation de l'Afrique par l'Europe, les blancs ont presque tous quitté le continent, l'Afrique du sud étant le pays où ils sont restés le plus nombreux avec 8% de la population. Pendant ce temps sur le continent américain, la Bolivie avec 55% d'amérindiens est le seul pays à avoir une population constituée de plus de 50% d'autochtones. Bien sûr, il ne s'agit pas dans les propos d'Arthur Manuel de chasser les descendants d'européens du Canada, il s'agit d'une décolonisation économique avant tout, politique aussi, et culturelle. Car la réalité de l'oppression postcoloniale et néocoloniale est bien là, en Amérique, où le président Trump vient de relancer les 2 oléoducs Keystone XL et Dakota Access qui menacent de polluer l'eau potable des autochtones, comme en Afrique où les plantations de palmiers à huile remplacent les forêts primaires et privent les paysans de leurs cultures vivrières. Mais alors comment en est-on arrivé à ces situations à la fois si semblables et si différentes sur ces 2 continents, dont l'exploitation des territoires et des humains par les européens a commencé au XVème siècle pour l'un comme pour l'autre, appuyée par les bulles papales Dum Diversas, Romanus Pontifex et Inter Caetera qui ont fourni une justification morale à l'asservissement et la colonisation des peuples non-chrétiens habitant les nouvelles terres découvertes ? C'est sans doute en remontant à ces origines que nous pourrons essayer de répondre à ces questions.